Je ne me serais jamais permis de 'jouer' avec la photo d'une icône, mais il faut croire que les anges sont moins scrupuleux que moi ! L'apparition soudaine de cette image hier, montrant ensemble celles que j'appelle mes deux mères, Rose et Bernadette, a été un choc émerveillé.  Une des deux images surperposées, une aquarelle intitulée "Ai-je la force que tu te laisses aller, maman ?", peinte en 2011 dans un contexte de formation en art-thérapie, a été publiée hier 4 octobre 2014 et elle avait pour thème la mort de Rose survenue le 2 octobre 2009. 

C'est le point de départ. 

Quand Bernadette est décédée, en 1985, sa fille qui l'accompagnait avait vraiment l'impression que la belle soeur de sa mère, tante Rosalie, était présente 'de l'autre côté'.   Voici son témoignage, formulé en mes mots :  'Je lui tenais la main et je sentais qu'une autre main se tendait de l'autre côté pour l'aider à traverser.'  C'est exactement ce que j'ai ressenti en voyant l'empreinte de l'icône de sainte Bernadette Soubiroux, une petite icône que j'ai écrite en 2013, apparaître sur le corps de Rose dans mon dessin. 

Techniquement, l'image numérique dont il est question ici est née quand j'ai voulu effacer le texte écrit sur l'aquarelle avant d'en faire la publication sur ce site et sur Facebook.  Peu familière avec photoshop, j'ai cru choisir une gomme à effacer carrée, mais il s'agissait en fait d'une forme créée précédemment par le logiciel à partir de la photo de l'icône de sainte Bernadette.  C'était là une manoeuvre totalement accidentelle et dont je n'ai eu aucune conscience sur le moment, ne sachant même pas qu'une telle fonction existait.  Croyant gommer le texte sur mon dessin, l'empreinte de l'icône s'est imposée sur l'image par un simple clic.  Sans comprendre du tout ce qui arrivait, j'ai essayé d'enlever cette surimpression, mais n'ai réussi qu'à la reproduire et c'est pourquoi on voit trois empreintes de sainte Bernadette en transparence sur l'aquarelle (voir gros plan). 

Voyant que tout fonçait à vue d'oeil, j'ai arrêté et c'est là que j'ai vu cette image aux tonalités de bure et qui montrait le visage dessiné de Rose, les yeux fermés et déjà presque morte, à travers lequel se voyait celui de l'icône.  À cause du cadre présent sur l'icône originale, on a aussi l'impression d'une sorte de porte en creux avec, au fond, un trait de lumière comme si cette porte s'ouvrait sur autre chose.  La théologie de l'icône dit que ce que nous représentons avec la peinture et l'or, c'est la figure du saint ou de la sainte dans son état transfiguré.  Cette théologie ancienne dit aussi que la sainte personne ainsi représentée est toute entière dans son icône, c'est-à-dire qu'elle y est vraiment présente, sur un mode relationnel et non substantiel, mais de manière bien réelle néanmoins.  A cette lumière, je reçois donc cette expérience-cadeau comme un symbole de la victoire de la vie sur la mort.  Cela me confirme aussi dans ma croyance que notre solidarité n'est pas arrêtée ou brisée par les frontières de la mort, mais que l'amour a vraiment le pouvoir de transcender cet ultime fossé. 

Esthétiquement, cette image numérique n'est pas très intéressante, mais elle parle suffisamment pour que je la publie.  Le surgissement, j'en ai parlé dans d'autres textes, est ce qui guide tout mon processus artistique.  Mais, quand même, davantage préoccupée par l'effet visuel que par ce qui se disait par le biais de cette image peu invitante, jai voulu reprendre le processus pour avoir une image plus définie et plus claire, mais ce n'était pas parlant, ça ne faisait plus le même sens.  J'ai donc publié l'original, sans plus de façon.

Michèle Lévesque

cr 2014-10-05